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Avons-nous vraiment perdu la bataille du climat ?


Cinq ans après les accords de Paris, les états signent un nouvel accord, avec des promesses plus ou moins engagées d’un soixantaine d’Etats. C’est bien entendu insuffisant. Insuffisant parce que les délais proposés restent trop long, parce qu’il n’y a toujours aucune coercition en cas de non-respect des engagements parce que, surtout, les solutions proposées restent aussi naïves qu’aveugle. Pour réduire l’impact climatique, nous voilà prêts à polluer sans vergogne les sols et les eaux, avec entre autres plus de véhicules électriques et autonomes alors que l’on connait leur impact terrible sur les pollutions, qui détruiront bien plus vite l’environnement que n’importe quel changement de climat.

Pour autant, avons-nous perdu la guerre comme beaucoup l’on dit ces derniers jours ? Avoir perdu la guerre, cela veut dire que c’est terminé. Les combattants se replient la tête basse, ruminant une reddition dans laquelle ils ont laissé leur dernière chemise. Avoir perdu la guerre, cela veut dire que c’est fini ; le combat est désormais vain. La tribune dans le monde appelant à se préparer à l’effondrement n’en est qu’un exemple (1). Je peux comprendre la volonté derrière ces mots. L’idée d’un électrochoc, d’un réalisme de circonstance. Et pourtant, je suis profondément persuadé que cette rhétorique est la pire de toutes. Elle est non seulement inutile, mais dans sa vision d’un combat désormais inutile, puisque perdu, elle fait baisser les bras des hésitants et des réfractaires. Alors si c’est fini, pourquoi se battre. Profitons de ce qu’il reste et après moi le déluge ! C’est les messages que je reçois de plus en plus.

Elle est terrible, cette idée, car elle s’inscrit profondément dans le cerveau. Il faut des années pour construire et une minute, un mot, pour tout détruire. Nos cerveaux ne sont pas différents des mondes. Un mot peut faire basculer une personne en un instant là où il faudra ensuite des mois pour transformer à nouveau la pensée. Et se persuader que tout est fini est le fiel le plus pernicieux à enfoncer dans les cerveaux. Car après quoi ? S’assoir et regarder l’effondrement ? Devenir terroriste climatique pour finir en beauté ? Construire quelques bunkers pour protéger ceux qui pourront l’être ? Car après… rien…

Alors bien sûr, il ne faut pas se voiler la face. L’optimisme béat, l’idée que nos technologies

sauveront l’affaire, n’aident pas plus qu’un pessimisme sans vision. La réalité est difficile. Les changements sont et vont être profonds, entre environnement (climat, pollution, espèces vivantes…) société (population, géopolitique, santé…) et technologie, et nous allons au-devant d’un nombre de défis considérables. C’est vrai. Nous ne pouvons attendre pour nous mettre en ordre de marche face à cela. Mais nous devons les regarder avec pragmatisme et une volonté sans faille. Pragmatisme, car la plupart des problèmes étaient déjà énoncés clairement il y a cinquante ans et que les manières utilisées, dont les injonctions à « tout est déjà fini », n’ont pas permis d’enrayer les comportements. Il faut donc aborder les choses vraiment différemment. Volonté, parce que rien, rien, ne peut se faire sans essayer. Sans agir. Sans croire que cela est possible. Sans se convaincre que les gestes que je fais, que les transformations que j’apporte, que la vision que je me donne, valent la peine d’être tentées. Se convaincre déjà que, oui, chacune, chacun, à notre échelle, nous avons une part de responsabilité ET de possibilité dans le grand chemin du futur. C’est là que le travail est le plus grand. Si le progrès de la prise de conscience est immense -91% des personnes pensent qu’il y a un problème environnemental- l’action est plus difficile puisque 79% de ces mêmes personnes pensent qu’elles ne peuvent rien faire ou qu’elles font déjà assez. Qu’elle n’en sont pas responsables ni de l’état, ni des actions pour en sortir (2). Et pour ces 79% de personnes, un peu plus de cinquante millions en France, annoncer que la bataille est perdue ne les aidera pas à agir, bien au contraire.

Soyons réalistes. La lutte est dure. Les besoins immenses. Les transformations de nos paradigmes nécessaires et profonds. Mais si nous étudions le passé et savons le présent, nul ne connait le futur. Nous ne pouvons qu’une chose. Faire tout ce que nous pouvons, chaque jour qui passe, pour le rendre possible.





2. Chiffre Covadapt et Ipsos.

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