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Les risques liés à la chaleur et comment s’en protéger (les impacts de la chaleur, No 4)


Les risques globaux liés à la chaleur s’étalent chaque jour dans les journaux : sécheresse intense, incendies gigantesques comme sur l’Ile de Rhode ou Hawaii (https://tinyurl.com/bdhftp2u), nombre de décès prématurés conséquents (https://tinyurl.com/5n96jsj9), et je passe sur la fonte des glaciers, le réchauffement des océans et autres qui sont des phénomènes de plus long terme, aux conséquences majeures. Ce n’est pas le sujet de ce post.

Ce dont nous parlons finalement moins, c’est le risque de la chaleur sur la santé humaine, et plus particulièrement sur nos cerveaux et comportements.

On comprend bien les effets de la chaleur sur notre physiologie. Les signaux sont assez clairs. Transpiration plus abondante, fatigue générale, maux de tête… Nos systèmes cardiovasculaires sont particulièrement sollicités, de même que les fonctions rénales et de la gestion de notre thermorégulation : notre corps lutte pour se maintenir à sa température nominale et à la préservation des fonctions vitales. Cela demande beaucoup d’énergie en sollicitant les membres régulateurs (reins, cœur, poumon) de manière intense. Sur un corps sain, cela ne pose pas immédiatement de problème majeur, bien que la répétition des périodes de canicules génère une fatigue qui à long terme va accélérer la dégradation de ces membres, avec des impacts sur l’espérance de vie. Sur les corps fragilisés par la maladie ou l’âge, cela peut être désastreux, et provoquer une mort immédiate, d’autant plus chez les personnes qui ne ressentent pas, ou plus, la soif, et en oublie de boire.


Impact cognitif !

Ce qui est beaucoup moins connus, c’est l’impact sur notre cerveau. Nous avons déjà tous vu ou vécu les insolations et maux de tête -qui peuvent être plus ou moins graves- mais sans jamais vraiment réfléchir à ce que cela veut dire pour nos milliards de cellules cérébrales enfermées dans un minuscule boitier fonctionnant presque en vase clos et dont les aérations sont très limitées. Même si les connaissances restent très parcellaires, nous commençons à mieux comprendre les risques des grandes chaleurs sur notre cerveau.


En premier lieu, si le cerveau a trop chaud, il va limiter son activité afin de ne pas augmenter la température par un fonctionnement trop intense. Il fonctionnera en « mode dégradé ». Vous en avez peut-être fait l’expérience, lorsque vous avez très chaud, réfléchir parait plus compliqué, faire des calculs complexes par exemple parait difficile, certaines mémoires vous échappent, ou autre. En soi, ce n’est pas dramatique, ces fonctions reviendront dès que le cerveau sera à nouveau « au calme » et après un peu de repos. Mais si cela se répète continuellement, alors le risque devient plus important, entre autres, de destruction de zone cellulaire. Plus embêtant, cela a aussi des influences sur nos comportements sociaux. Ce « mode dégradé » peut aussi affecter nos aptitudes à la tempérance ou au « rôle social » que nous mettons en œuvre en société et selon les circonstances. Une étude (https://doi.org/10.1016/S2542-5196(22)00173-5) vient de montrer par exemple l’augmentation des discours de haine lors des périodes de fortes chaleurs.


Un sommeil qui n'est plus réparateur

Pire, si la chaleur persiste durant les périodes de sommeils : ce temps de repos cognitif est majeur pour « nettoyer » notre cerveau, qui n’a pas l’énergie nécessaire pour le faire durant les temps d’activité de veille. Les toxines accumulées dans les cellules neuronales et les synapses sont éliminées par un mécanisme complexe de réduction de la taille des cellules cérébrales et de nettoyage des toxines via le système glymphatiques. Cette élimination de toxine est capitale pour assurer un bon fonctionnement cognitif au fil du temps.

En cas de forte chaleur, ce mécanisme énergivore est limité et n’élimine plus correctement les toxines. Au-delà d’une sensation de fatigue supérieure durant les périodes caniculaires, c’est donc également la préservation de nos aptitudes mentales qui sont en jeu. Les études sont en cours, mais il est probable que l’accumulation de toxine mal éliminée soit l’une des causes possibles de maladie mentale telles la dépression ou les dégénérescences de type Alzheimer.

En claire, les fortes chaleurs ne sont pas très indiquées pour nos corps, et encore moins pour nos cerveaux.


A l’heure des alertes chaleurs et des canicules dans plusieurs régions d’Europe et du monde, comment s’en protéger ?

Dans les pays qui vivent déjà dans des chaleurs intenses, c’est souvent la solution du "tout climatisation" qui est privilégiée. Avec trois problèmes majeurs : une surconsommation électrique, une augmentation des températures citadine et des maladies chroniques dues à la climatisation elle-même. Ce n’est pas une solution à long terme ! La climatisation est utile dans une utilisation raisonnée, en évitant les différentiels extérieur/intérieur trop importants.


À titre individuel nous pouvons :

- Rester le plus possible à l’ombre lors des périodes de fortes chaleurs, éviter les efforts importants, se rafraichir avec un brumisateur (aussi efficace qu’une douche et 100 fois moins consommatrices d’eau) et/ou des tissus humidifiés sur la tête et le coup ; mettre un bol d’eau à côté de son lit, idéalement près d’une fenêtre ou éventuellement devant un ventilateur. Plus la circulation d’air un peu humide est grande, mieux ce sera dans ces conditions.

- Et surtout boire. Mais pas n’importe comment. La pire des choses à faire, c’est de boire de grandes quantités d’un coup. Les reins, déjà sollicités par les conditions, risque de ne pas supporter cette hyperhydratation (hyponatrémie) qui va provoquer soudainement une dilution du % de sodium dans le corps. Les premiers symptômes sont souvent des nausées, des vomissements, l’impression de ne jamais être hydraté alors que l’on ne cesse de boire. On peut donc boire beaucoup, mais en quantité peu abondante à la fois. Boire toutes les 10 minutes ou quarts d’heure, quelques gorgées. Il est tout à fait possible d’ajouter des « électrolytes » dans l’eau (poudre que l’on trouve partout) pour équilibrer l’apport en eau et en sel minéraux. Dans la journée, on peut ainsi boire plusieurs litres (jusqu’à 7-8 litres dans les cas de fortes chaleurs), mais boire un litre d’un seul coup peut s’avérer dangereux, et encore plus pour les eaux peu riche en sodium. Dans un même temps, réduire les consommations de caféine, théine, alcool et autres drogues, qui sont à augmenter la déshydratation.


À titre collectif :

Ce poste n’a pas pour but de faire une liste exhaustive des actes à entreprendre pour réduire les effets de la chaleur. En matière structurelle, de nombreux rapports et documents proposent déjà des solutions intéressantes (Paris à 50°C par exemple https://tinyurl.com/4upasut4) comme les peintures blanches, les toits végétalisés, les paravents, plus d’arbres dans les rues et autres. Mais une notion est encore plus importante à mon sens : le changement de nos horaires de travail. Il est indispensable de s’adapter aux conditions de chaleurs pour être actif lors des heures fraiches. Il faut utiliser la nuit pour dormir et reposer nos cerveaux, mais il est possible dans beaucoup de métier de commencer à 5h du matin pour terminer à 12h ou faire une longue pause de 11h à 16h par exemple. Cela demande une acceptation individuelle, mais aussi collective, avec une totale remise en cause de nos habitudes de travail et mode de vie durant les périodes de chaleur. Mais plus qu’un horaire d’été et d’hiver, nous aurions grandement besoin d’un horaire de chaleur, qui se déclencherait dès certaines températures atteintes.

On en parle ?


Dernier post sur la chaleur à venir : Comment éviter le pire climatique

Photo : Lucas Santucci/Human Adaptation Institute

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